Le régime de taxation des non-domiciliés : cadre juridique en vigueur et incitations fiscales

Le cadre juridique en vigueur

Depuis 2019, des dispositions ont été introduites dans la loi n° 4172/2013 (Code des Impôts sur le Revenu, ci-après « CIR ») afin d’instaurer des incitations fiscales destinées à attirer en Grèce des résidents fiscaux[1], désignés sous le terme de non-domiciled residents ou non-dom. L’objectif d’un régime fiscal non-dom est de désigner le pays d’accueil (en l’occurrence la Grèce) comme l’État responsable de la taxation complète de l’individu, moyennant l’application d’un forfait fiscal sur les revenus de source étrangère[2] (quelle qu’en soit le montant).

Le processus de transfert de la résidence fiscale en Grèce est régi par les principes généraux de l’OCDE, tandis que la taxation des revenus de source étrangère et les éventuelles possibilités de crédits d’impôt ou d’exemptions sont régies par les conventions fiscales de double imposition (CDI) applicables entre la Grèce et d’autres pays. Dans la plupart des cas, le contribuable déclare ses revenus uniquement dans son pays de résidence fiscale pour l’ensemble de ses revenus mondiaux[3].

  1. Les incitations fiscales offertes

Le CIR prévoit des dispositions favorables concernant le traitement fiscal des personnes physiques transférant leur résidence fiscale en Grèce. Ces dispositions sont notamment prévues aux articles 5A, 5B et 5C du CIR, examinés ci-dessous.

  1. Procédure alternative d’imposition distincte des revenus étrangers des particuliers à haut revenu et détenteurs d’un permis de séjour investisseur (art. 5A du CIR)

Pour qu’un contribuable – personne physique – transférant sa résidence fiscale en Grèce puisse bénéficier de ce régime alternatif, les conditions cumulatives suivantes doivent être remplies :

  1. a) le contribuable ne doit pas avoir été résident fiscal en Grèce pendant 7 des 8 années précédant le transfert de sa résidence fiscale en Grèce, et
  2. b) il doit prouver qu’il investit lui-même ou un membre de sa famille (conjoint, ascendants ou descendants en ligne directe) ou via une entité juridique dans laquelle il détient une participation majoritaire, un montant d’au moins 500 000 € en biens immobiliers, entreprises, titres ou participations en Grèce.

L’investissement doit être réalisé dans un délai de 3 ans à compter de la date de dépôt de la demande. Cette condition n’est pas requise si le contribuable détient et maintient un permis de séjour pour investissement en Grèce conformément à l’article 16 de la loi n° 4251/2014.

Une fois soumis à ce régime, le contribuable doit s’acquitter d’un impôt annuel forfaitaire de 100 000 € couvrant l’intégralité de ses revenus étrangers. Il peut également inclure les membres de sa famille moyennant un supplément de 20 000 € par personne. Le paiement de cet impôt libère le contribuable de toute autre obligation fiscale sur ses revenus étrangers, mais il reste imposable sur ses revenus grecs selon le CIR[4]. En outre, il existe une exonération de l’impôt sur les donations et successions concernant les biens à l’étranger et il n’y a pas d’obligation de justifier l’origine des devises importées en Grèce. La durée maximale d’application de ce régime est de 15 ans.

La demande de transfert de la résidence fiscale en vertu du régime alternatif de taxation des revenus provenant de l’étranger doit être soumise à l’Administration Fiscale (au bureau des Résidents à l’Étranger & de l’Imposition Alternative des Résidents fiscaux locaux) par la personne physique avant le 31 mars de l’année fiscale concernée, et doit être accompagnée d’une preuve de transfert du montant minimum de l’investissement de 500 000 euros sur un compte d’un établissement financier établi en Grèce. Dans le même délai, les personnes physiques qui remplissent les conditions ci-dessus et ont déjà transféré leur résidence fiscale en Grèce au cours de l’année fiscale précédente peuvent également soumettre une demande. L’Administration Fiscale examine la demande et rend une décision avant le dernier jour ouvrable du mois de juin de l’année de soumission de la demande.

  1. Taxation alternative des revenus des retraités étrangers (art. 5B du CIR)

L’article 5B du CIR vise à attirer les retraités étrangers en prévoyant une imposition alternative sur les revenus perçus à l’étranger, à condition que le demandeur retraité :

  1. a) soit bénéficiaire d’un revenu de retraite d’origine étrangère,
  2. b) n’ait pas été résident fiscal en Grèce pendant 5 des 6 années précédant le transfert de sa résidence fiscale en Grèce, et
  3. c) transfère sa résidence fiscale depuis un État lié à la Grèce par une convention de coopération administrative en matière fiscale.

Si ces conditions sont remplies, le retraité est imposé à un taux unique de 7 % sur l’ensemble de ses revenus étrangers pour une période de 15 ans.

La demande de transfert de résidence fiscale avec soumission au mode alternatif d’imposition des revenus perçus à l’étranger doit être déposée auprès de l’Administration Fiscale (au bureau des Résidents à l’Étranger & de l’Imposition Alternative des Résidents fiscaux locaux) par le retraité concerné, au plus tard le 31 mars de chaque année fiscale.

III. Le cas des salariés et travailleurs indépendants (art. 5C du CIR)

L’article 5C du CIR vise à favoriser le retour des Grecs expatriés et à attirer une main-d’œuvre étrangère hautement qualifiée. À cette fin, il prévoit pour les personnes physiques transférant leur résidence fiscale en Grèce une exonération d’impôt sur le revenu et de contribution de solidarité pour 50 % de leurs revenus salariaux ou issus d’une activité professionnelle exercée en Grèce au cours de chaque année fiscale, et ce pour une période de 7 années fiscales consécutives. Pour bénéficier de ce régime, le demandeur doit remplir les conditions suivantes :

  1. a) ne pas avoir été résident fiscal en Grèce pendant 5 des 6 années précédant le transfert de sa résidence fiscale en Grèce,
  2. b) transférer sa résidence fiscale depuis un État membre de l’UE/EEE ou un État lié à la Grèce par une convention de coopération fiscale,
  3. c) fournir des services en Grèce dans le cadre d’un contrat de travail (ou démarrer une activité professionnelle/indépendante en Grèce) pour un nouveau poste, et
  4. d) s’engager à résider en Grèce pendant au moins deux ans.

Les personnes remplissant ces conditions bénéficient d’une exonération de 50 % sur leurs revenus d’emploi ou d’activité professionnelle, couvrant à la fois l’impôt sur le revenu et la contribution de solidarité. Par ailleurs, les règles annuelles de dépenses objectivées pour le logement et les véhicules particuliers ne s’appliquent pas[5].

Pour un service commençant après le 2 juillet de l’année en cours, la demande doit être soumise pour l’année suivante, à partir de la prise de service et jusqu’à la fin de cette année. Dans un délai de 60 jours à compter de la soumission de la demande, l’Administration Fiscale examine la demande et rend une décision.

La mise en place des incitations fiscales mentionnées ci-dessus a été complétée par la loi 4778/2021, qui a introduit l’article 71H du CIR. Cet article établit pour la première fois des règles précises concernant la création et le fonctionnement des « Family Offices », à savoir des sociétés à but spécifique dédiées à la gestion du patrimoine familial, avec pour objectif exclusif de fournir un soutien aux individus et à leurs familles dans l’administration et la gestion de leurs actifs et investissements[6].

 

Texte rédigé et édité par: Thalia Dolka, avocate à Athènes, titulaire de Master 2 en Droit Civil, candidate à un master 2 à la Faculté de Droit de Strasbourg.

 

[1] Papadakis I., Les premières applications des régimes favorables des articles 5A, 5B et 5C du Code de l’impôt sur le revenu, Revue juridique « Théorie et Pratique du Droit Administratif 10/2022 », p. 1058.

[2] Skouzos Th., Dafouli E., Le régime de résidence fiscale non-domiciliée en Grèce et les problèmes qui en découlent, Revue juridique « Droit des affaires et des sociétés » 11/2020, p. 1273.

[3] Stoupakis K., La fiscalité des expatriés grecs et des immigrés américains en Grèce, Revue juridique « Entreprise » 194/2022, p. 612.

[4] Skouzos Th., Dafouli E., ibid., p. 1272.

[5] Pantzopoulos P., Sideromenou K., Kalampaliki K., Sur le type de taxes… Un regard sur l’impact des développements récents de la fiscalité en Grèce et dans le monde, Revue juridique “Avocat”, 144/2021, p. 93.

[6] Papadakis I., ibid., p. 1058.